Faits et procédure 

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 3 avril 2019), un conseil des prud’hommes a, par jugement du 15 septembre 2016, dit que la convention de rupture conventionnelle passée entre M. Z et son employeur, la société C3F, était régulière mais a débouté le salarié de ses demandes indemnitaires. 

2. Le jugement a été notifié à M. Z, le 4 octobre 2016. La notification comportait une erreur relative aux modalités de représentation devant la cour d’appel. 

3. M. Z a interjeté appel du jugement par le Réseau Privé Virtuel Avocat (RPVA) devant la cour d’appel de Paris, le 3 novembre 2016. 

4. Une seconde notification a été reçue le 4 novembre 2016, par M. Z mentionnant que la représentation était obligatoire devant la cour d’appel. 

5. Par ordonnance du 9 novembre 2016, le conseiller de la mise en état de la cour d’appel de Paris a déclaré l’appel de M. Z irrecevable. 

6. M. Z a formé un nouvel appel devant la cour d’appel de Versailles, le 3 avril 2017. Le président de la chambre saisie a fixé un calendrier de procédure, le 5 juillet 2017 faisant application des dispositions des articles 905 et suivants du code de procédure civile. Il a, par ordonnance du 23 janvier 2019, déclaré irrecevable l’incident tendant à voir déclarer cet appel irrecevable. 

Examen du moyen

Enoncé du moyen
... fait grief à l'arrêt de déclarer son appel irrecevable alors : 

« 1 / qu’une seconde notification d’un jugement, faisant suite à une première notification ayant comporté des mentions erronées quant aux modalités d’exercice du recours juridictionnel, n’est pas de nature à faire courir le délai d’appel, même si elle n’est pas entachée d’erreur en ce qui a trait aux modalités d’exercice du recours, sauf si cette seconde notification indique que la précédente était erronée et qu’elle se substitue à elle ou la rectifie ; qu’en retenant au contraire qu’en l’état d’une première notification erronée, il n’était pas nécessaire que la seconde notification indique être rectificative de la précédente pour que puisse courir le délai du recours juridictionnel, la cour d’appel a violé, par fausse interprétation, les articles 651, 680 et 693 du code de procédure civile ; 

2 / qu’en privant le salarié d’accès au juge d’appel, sans qu’il soit constaté que la seconde notification avait indiqué rectifier la précédente ni donc que le salarié avait été mis en mesure de connaître les modalités d’appel dans des conditions lui permettant d’exercer utilement son droit au recours, la cour d’appel a violé l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. » 

Réponse de la Cour 

Vu les articles 651 et 680 du code de procédure civile, et l’article 6,§1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales :

8. Il résulte de ces textes qu’une notification, intervenue après une première notification irrégulière, ne peut faire courir le délai de recours si elle ne précise pas qu’elle se substitue à la première. 

9. Pour déclarer l’appel formé le 3 avril 2017 irrecevable comme tardif, l’arrêt retient que la première notification reçue le 4 octobre 2016, qui comportait l’adresse du greffe de la cour d’appel de Versailles au verso de l’acte, sous la mention « appel », ne mentionnait pas les modalités précises modifiées substantiellement depuis le 1 août 2016 mais contenait les modalités de la procédure orale applicable antérieurement à cette date et que, par conséquent, cette notification ne faisait pas courir le délai d’appel. 

10. L’arrêt ajoute que la seconde notification contenant les nouvelles modalités de la procédure écrite, reçue le 4 novembre 2016, était nécessairement rectificative, même sans mention expresse alors qu’elle succédait à la première notification erronée. 

11. En statuant ainsi, alors que la notification effectuée par le greffe, le 4 novembre 2016 ne précisait pas qu’elle se substituait à celle irrégulièrement faite auparavant, le 4 octobre 2016, de sorte que cette notification irrégulière n’avait pas fait courir le délai de recours, la cour d’appel a violé les textes susvisés. 

PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 3 avril 2019, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ; 

Remet l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Versailles autrement composée ; 

Condamne la société C3F aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes. 

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; 

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du dix 

sept septembre deux mille vingt, et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. 

MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour M. Z Le moyen reproche à l’arrêt attaqué D’AVOIR déclaré irrecevable l’appel interjeté par monsieur Z ; 

AUX MOTIFS QUE sur la recevabilité de l’appel interjeté le 3 avril 2017 devant la cour d’appel de Versailles, l’article 680 du code de procédure civile disposait que l’acte de notification d’un jugement devait indiquer de manière très apparente le délai d’opposition, d’appel ou de pourvoi en cassation dans le cas où l’une de ces voies de recours était ouverte, ainsi que les modalités selon lesquelles le recours pouvait être exercé ; qu’une notification omettant d’indiquer la voie de recours appropriée ne faisait pas courir le délai ; que l’article R.1461-1 du code du travail disposait que le délai d’appel était d’un mois ; qu’en l’espèce, il résultait du dossier de première instance que la première notification du jugement envoyée le 28 septembre 2016 par le conseil de prud’hommes de Boulogne Billancourt avait été reçue le 30 septembre 2016 par la société, comme en attestait l’accusé de réception ; qu’il comportait le tampon et la signature de la société C3F ; que la première notification reçue le 4 octobre 2016 par le salarié, qui comportait l’adresse du greffe de la cour d’appel de Versailles au verso de l’acte de notification sous la mention « APPEL * code du travail (extraits) », ne mentionnait cependant pas les modalités précises d’appel modifiées substantiellement depuis le 1er août 2016 mais contenait les modalités de la procédure orale applicables antérieurement à cette date ; qu’ainsi, en application de l’article 680 du code de procédure civile, cette notification n’avait pas fait courir le délai d’appel ; que la seconde notification contenant les nouvelles modalités sur la procédure écrite qui avait été notifiée le 3 novembre 2016, avait été reçue le 4 novembre 2016 par le salarié ; que même sans mention expresse à ce sujet, succédant à une première notification, elle était nécessairement rectificative ; qu’il devait donc être constaté que le jugement avait été régulièrement notifié le 4 novembre 2016 ; que le jugement ayant été régulièrement notifié le 4 novembre 2016, l’appel formé par monsieur Z le 3 avril 2017 était irrecevable (arrêtpp.3et4); 

ALORS QU’une seconde notification d’un jugement, faisant suite à une première notification ayant comporté des mentions erronées quant aux modalités d’exercice du recours juridictionnel, n’est pas de nature à faire courir le délai d’appel, même si elle n’est pas entachée d’erreur en ce qui a trait aux modalités d’exercice du recours, sauf si cette seconde notification indique que la précédente était erronée et qu’elle se substitue à elle ou la rectifie ; qu’en retenant au contraire qu’en l’état d’une première notification erronée, il n’était pas nécessaire que la seconde notification indique être rectificative de la précédente pour que puisse courir le délai du recours juridictionnel, la cour d’appel a violé, par fausse interprétation, les articles 651, 680 et 693 du code de procédure civile ; 

ALORS, X A, QU’en privant le salarié d’accès au juge d’appel, sans qu’il soit constaté que la seconde notification avait indiqué rectifier la précédente ni donc que le salarié avait été mis en mesure de connaître les modalités d’appel dans des conditions lui permettant d’exercer utilement son droit au recours, la cour d’appel a violé l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.