Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Dijon, 22 mai 2018), Mme O..., qui s'était rendue caution des engagements souscrits par la société [...], dont elle était l'unique associée, au titre d'un prêt consenti par la société Caisse d'épargne (la banque), a cédé ses parts à MM. J... et X... par un acte du 7 avril 2010, lequel avait été précédé d'une promesse de cession sous condition suspensive d'obtention de la mainlevée de son cautionnement bancaire et de substitution des cessionnaires à cet engagement.

2. Ayant été condamnée à payer à la banque, en sa qualité de caution, les sommes dues au titre du solde du prêt par la société [...], mise en liquidation judiciaire, Mme O... a assigné en responsabilité la société d'expertise-comptable Equinoxe, qui avait été chargée de la rédaction des actes et formalités de cession.

Sur le moyen unique, pris en ses première et deuxième branches, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen unique, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

4. Mme O... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes alors « qu'après avoir retenu que le préjudice causé à Mme O... par la faute ayant consisté, pour l'expert-comptable, à ne pas l'informer d'une absence de transfert de la charge du cautionnement par elle précédemment souscrit, était la simple perte d'une chance de ne pas conclure la cession, la cour d'appel s'est bornée, pour exclure l'existence d'une telle perte de chance, à relever que Mme O... n'avait fourni aucun élément relatif à la situation financière de la société, permettant de mesurer l'incidence qu'aurait eu un refus de cession ; qu'en se fondant ainsi exclusivement sur une considération impropre à exclure à elle seule l'existence d'une perte de chance de ne pas conclure la cession, la décision de conclure ou non la cession n'étant pas dans la seule dépendance de la situation financière de la société au moment de la cession ou postérieurement à celle-ci, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 ancien du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 :

5. Il résulte de ce texte que, sauf cause étrangère, le débiteur d'une obligation contractuelle est tenu de réparer, le cas échéant par le paiement de dommages-intérêts, le préjudice causé à son cocontractant en raison de l'inexécution fautive, ou réputée fautive, de cette obligation.

6. Pour rejeter les demandes de Mme O..., l'arrêt, après avoir retenu que son dommage résultant du manquement de la société Equinoxe à l'obligation de l'informer sur les conséquences d'une absence de transfert du cautionnement consistait en une perte de chance de ne pas céder ses parts, relève que Mme O... ne fournit aucun élément relativement à la situation financière de la société bénéficiant de son cautionnement, qui permettrait de mesurer l'incidence qu'aurait eu un refus de cession.

7. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir que la probabilité de non-réalisation de la cession était nulle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute Mme O... de ses demandes et la condamne aux dépens de première instance et d'appel, l'arrêt rendu le 22 mai 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Besançon ;

Condamne la société Equinoxe aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Equinoxe et la condamne à payer à Mme O... la somme de 3 000 euros ;