Considérant ce qui suit :

 

1. L’article L. 511-1 du code de justice administrative dispose que : « Le juge des référés statue par des mesures qui présentent un caractère provisoire. Il n’est pas saisi du principal et se prononce dans les meilleurs délais ». Aux termes de l’article L. 521-2 du même code: « Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures. »

 

2. Les requêtes visées ci-dessus, qui sont présentées en application de l’article L. 521-2 du code de la justice administrative, notamment par des fidèles et des membres du clergé catholiques, dont certains résident en Alsace et en Moselle, sont dirigées contre le décret du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire en tant que, par son article 47, il interdit les rassemblements, à l’exception des cérémonies funéraires, dans les lieux de culte et s’agissant de certaines requêtes, en tant que par son article 4, il restreint la possibilité de sortir de son domicile pour se rendre dans les lieux précités. Elles présentent à juger les mêmes questions, il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule ordonnance. 

 

3. L’Association familiale catholique (AFC) de Nice et l’association « Pour la messe », sous le n° 445853, Mgr AF... et l’Association familiale catholique (AFC) Centre Alsace, sous le n° 445878, ainsi que M. GF..., sous le n° 445879, justifient d’un intérêt suffisant pour intervenir à l’appui des requêtes. Ainsi, leurs interventions sont recevables. 

 

Sur le cadre du litige : 

 

4. Aux termes de l’article L.3131-12 du code de la santé publique, issu de la loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19: « L'état d'urgence sanitaire peut être déclaré sur tout ou partie du territoire métropolitain ainsi que du territoire des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution et de la Nouvelle-Calédonie en cas de catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population ». L’article L. 3131-13 du même code, précise que « L'état d'urgence sanitaire est déclaré par décret en conseil des ministres pris sur le rapport du ministre chargé de la santé. (…) /La prorogation de l'état d'urgence sanitaire au-delà d'un mois ne peut être autorisée que par la loi, après avis du comité de scientifiques prévu à l'article L. 3131-19 ». Enfin, il résulte de l’article L. 3131-15 du même code que « dans les circonscriptions territoriales où l'état d'urgence sanitaire est déclaré, le Premier ministre peut, par décret réglementaire pris sur le rapport du ministre chargé de la santé, aux seules fins de garantir la santé publique » prendre un certain nombre de mesures de restriction ou d’interdiction des déplacements, activités et réunions « strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu ». 

 

5. L'émergence d'un nouveau coronavirus, responsable de la maladie à coronavirus 2019 ou covid-19 et particulièrement contagieux, a été qualifiée d’urgence de santé publique de portée internationale par l'Organisation mondiale de la santé le 30 janvier 2020, puis de pandémie le 11 mars 2020. La propagation du virus sur le territoire français a conduit le ministre des solidarités et de la santé puis le Premier ministre à prendre, à compter du 4 mars 2020, des mesures de plus en plus strictes destinées à réduire les risques de contagion. Pour faire face à l’aggravation de l’épidémie, la loi du 23 mars 2020 mentionnée ci-dessus a créé un régime d’état d’urgence sanitaire aux articles L. 3131-12 à L. 3131-20 du code de la santé publique et déclaré l'état d'urgence sanitaire pour une durée de deux mois à compter du 24 mars 2020. La loi du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ces dispositions, a prorogé cet état d’urgence sanitaire jusqu’au 10 juillet 2020 inclus. L’évolution de la situation sanitaire a conduit à un assouplissement des mesures prises et la loi du 9 juillet 2020, a organisé un régime de sortie de cet état d’urgence. 

 

6. Une nouvelle progression de l’épidémie a conduit le Président de la République à prendre, sur le fondement des articles L. 3131-12 et L. 3131-13 du code de la santé publique, le décret du 14 octobre 2020 déclarant l’état d’urgence à compter du 17 octobre à 00 heure sur l’ensemble du territoire national. Le 29 octobre 2020, le Premier ministre a pris, sur le fondement de l’article L. 3131-15 du code de la santé publique, le décret contesté, prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire. 

 

Sur la liberté de culte 

 

7. Aux termes de l’article 10 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la loi ». Aux termes de l’article 9 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : « 1 - Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l’enseignement, les pratiques et l’accomplissement des rites. / 2 - La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l’ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d’autrui ». Aux termes de l’article 18 du pacte international relatif aux droits civils et politiques : « Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté d’avoir ou d’adopter une religion ou une conviction de son choix, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction, individuellement ou en commun, tant en public qu’en privé, par le culte et l’accomplissement des rites, les pratiques et l’enseignement. (…) / La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l’objet que des seules restrictions prévues par la loi et qui sont nécessaires à la protection de la sécurité, de l’ordre et de la santé publique, ou de la morale ou des libertés et droits fondamentaux d’autrui. (…) ». 

 

8. Aux termes de l’article 1er de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat : « La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l'intérêt de l'ordre  public ». Aux termes de l’article 25 de la même loi : « Les réunions pour la célébration d'un culte tenues dans les locaux appartenant à une association cultuelle ou mis à sa disposition sont publiques. Elles sont dispensées des formalités de l'article 8 de la loi du 30 juin 1881, mais restent placées sous la surveillance des autorités dans l'intérêt de l'ordre public. ». 

 

9. Aux termes de l’article 1er de la convention passée à Paris le 26 messidor an IX, entre le Pape et le gouvernement français, qui est applicable aux catholiques d’Alsace et de Moselle, dès lors que la convention a été promulguée et rendue exécutoire, avec ses articles organiques, comme lois de la République par la loi du 18 germinal an X relative à l'organisation des cultes, puis est restée applicable, dans les départements concernés, à la suite, notamment de la loi du 17 octobre 1919 relative au régime transitoire de l'Alsace et de la Lorraine et de la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle : « La religion catholique, apostolique et romaine, sera librement exercée en France. Son culte sera public, en se conformant aux règlements de police que le Gouvernement jugera nécessaires pour la tranquillité publique ». Aux termes de l’article organique IX de cette convention : « Le culte catholique sera exercé sous la direction des archevêques et évêques dans leurs diocèses, et sous celle des curés dans leurs paroisses ». 

 

10. La liberté du culte présente le caractère d’une liberté fondamentale. Telle qu’elle est régie par la loi, cette liberté ne se limite pas au droit de tout individu d’exprimer les convictions religieuses de son choix dans le respect de l’ordre public. Elle comporte également, parmi ses composantes essentielles, le droit de participer collectivement, sous la même réserve, à des cérémonies, en particulier dans les lieux de culte. La liberté du culte doit, cependant, être conciliée avec l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé. 

 

Sur les dispositions du décret contesté 

 

11. Aux termes de l’article 1er du décret contesté : « I. - Afin de ralentir la propagation du virus, les mesures d'hygiène définies en annexe 1 au présent décret et de distanciation sociale, incluant la distanciation physique d'au moins un mètre entre deux personnes, dites barrières, définies au niveau national, doivent être observées en tout lieu et en toute circonstance. / II. - Les rassemblements, réunions, activités, accueils et déplacements ainsi que l'usage des moyens de transports qui ne sont pas interdits en vertu du présent décret sont organisés en veillant au strict respect de ces mesures. (…) ». 

 

12. Aux termes de l’article 3 du décret contesté : « I. - Tout rassemblement, réunion ou activité sur la voie publique ou dans un lieu ouvert au public, qui n'est pas interdit par le présent décret, est organisé dans des conditions de nature à permettre le respect des dispositions de l'article 1er. / II. - Les organisateurs des manifestations sur la voie publique mentionnées à l'article L. 211-1 du code de la sécurité intérieure adressent au préfet de département sur le territoire duquel la manifestation doit avoir lieu, sans préjudice des autres formalités applicables, une déclaration contenant les mentions prévues à l'article L. 211-2 du même code, en y précisant, en outre, les mesures qu'ils mettent en oeuvre afin de garantir le respect des dispositions de l'article 1er du présent décret. / Sans préjudice des dispositions de l'article L. 211-4 du code de la sécurité intérieure, le préfet peut en prononcer l'interdiction si ces mesures ne sont pas de nature à permettre le respect des dispositions de l'article 1er. / III. - Les rassemblements, réunions ou activités sur la voie publique ou dans un lieu ouvert au public autres que ceux mentionnés au II mettant en présence de manière simultanée plus de six personnes sont interdits. / Ne sont pas soumis à cette interdiction : / (…) 3° Les établissements recevant du public dans lesquels l'accueil du public n'est pas interdit en application du présent décret ; / La dérogation mentionnée au 3° n'est pas applicable pour la célébration de mariages ». 

 

13. Aux termes de l’article 4 du décret contesté : « I. - Tout déplacement de personne hors de son lieu de résidence est interdit à l'exception des déplacements pour les motifs suivants en évitant tout regroupement de personnes : / 1° Déplacements à destination ou en provenance : / a) Du lieu d'exercice ou de recherche d'une activité professionnelle et déplacements professionnels ne pouvant être différés ; / b) Des établissements ou services d'accueil de mineurs, d'enseignement ou de formation pour adultes mentionnés aux articles 32 à 35 du présent décret ; / c) Du lieu d'organisation d'un examen ou d'un concours ; / 2° Déplacements pour effectuer des achats de fournitures nécessaires à l'activité professionnelle, des achats de première nécessité, des retraits de commandes et des livraisons à domicile ; / 3° Déplacements pour effectuer des consultations, examens et soins ne pouvant être assurés à distance et pour l'achat de médicaments ; / 4° Déplacements pour motif familial impérieux, pour l'assistance aux personnes vulnérables et précaires, pour la garde d'enfants, ainsi que pour les déménagements ; / 5° Déplacements des personnes en situation de handicap et leur accompagnant ; / 6° Déplacements brefs, dans la limite d'une heure quotidienne et dans un rayon maximal d'un kilomètre autour du domicile, liés soit à l'activité physique individuelle des personnes, à l'exclusion de toute pratique sportive collective et de toute proximité avec d'autres personnes, soit à la promenade avec les seules personnes regroupées dans un même domicile, soit aux besoins des animaux de compagnie ; / 7° Déplacements pour répondre à une convocation judiciaire ou administrative ou pour se rendre dans un service public ou chez un professionnel du droit, pour un acte ou une démarche qui ne peuvent être réalisés à distance ; / 8° Participation à des missions d'intérêt général sur demande de l'autorité administrative. / II. - Les personnes souhaitant bénéficier de l'une de ces exceptions doivent se munir, lors de leurs déplacements hors de leur domicile, d'un document leur permettant de justifier que le déplacement considéré entre dans le champ de l'une de ces exceptions. / Les mesures prises en vertu du I ne peuvent faire obstacle à l'exercice d'une activité professionnelle sur la voie publique dont il est justifié dans les conditions prévues à l'alinéa précédent ». 

 

14. Aux termes de l’article 47 du décret contesté: « I. - Les établissements de culte, relevant de la catégorie V, sont autorisés à rester ouverts. Tout rassemblement ou réunion en leur sein est interdit à l'exception des cérémonies funéraires dans la limite de 30 personnes. / II. - Toute personne de onze ans ou plus qui accède ou demeure dans ces établissements porte un masque de protection. / L'obligation du port du masque ne fait pas obstacle à ce que celui-ci soit momentanément retiré pour l'accomplissement des rites qui le nécessitent. / III. - Le gestionnaire du lieu de culte s'assure à tout moment, et en particulier lors de l'entrée et de la sortie de l'édifice, du respect des dispositions mentionnées au présent article. / IV. - Le préfet de département peut, après mise en demeure restée sans suite, interdire l'accueil du public dans les établissements de culte si les conditions de leur organisation ainsi que les contrôles mis en place ne sont pas de nature à garantir le respect des dispositions mentionnées au présent article ». Eu égard aux dispositions précitées du III de l’article 3 du décret, les cérémonies religieuses pour les mariages doivent être regardées, même si les dispositions gagneraient à être explicitées, comme n’étant pas interdites dans les lieux de culte, dans la limite de six personnes, ainsi que l’a expressément indiqué le Premier ministre lors de sa conférence de presse du 28 octobre 2020. 

 

15. Aux termes, enfin, de l’article R. 123-2 du code de la construction et de l’habitation : « Pour l'application du présent chapitre, constituent des établissements recevant du public tous bâtiments, locaux et enceintes dans lesquels des personnes sont admises, soit librement, soit moyennant une rétribution ou une participation quelconque, ou dans lesquels sont tenues des réunions ouvertes à tout venant ou sur invitation, payantes ou non. / Sont considérées comme faisant partie du public toutes les personnes admises dans l'établissement à quelque titre que ce soit en plus du personnel ». Aux termes de l’article R. 123-12 du même code : « Le ministre de l'intérieur précise dans un règlement de sécurité pris après avis de la commission centrale de sécurité prévue à l'article R. 123-29 les conditions d'application des règles définies au présent chapitre. (…) ». Aux termes de l’article GN1 de l’arrêté du 25 juin 1980 portant approbation des dispositions générales du règlement de sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public : « Les établissements sont classés en types, selon la nature de leur exploitation : / a) Etablissements installés dans un bâtiment :/ (…) V Etablissements de culte ». 

 

16. Il résulte de ces dispositions que l’ensemble des établissements classés dans le type V intitulé « établissements de culte » sont autorisés à demeurer ouverts. Ces établissements restent librement accessibles par les ministres du culte et toutes les personnes qui peuvent être regardées comme relevant de leur personnel. Ces personnes peuvent y participer, notamment aux fins d’en assurer la retransmission, à des cérémonies religieuses, dans le respect des mesures dites barrières et notamment du port d’un masque, lequel peut être momentanément retiré pour l'accomplissement des rites qui le nécessitent. Les autres personnes peuvent participer à ces cérémonies lors des enterrements et des mariages, dans la limite respectivement de trente et de six personnes. Elles peuvent aussi se rendre dans ces établissements à l’occasion de l’un quelconque de leurs déplacements autorisés hors de leur domicile, sans se munir d’un autre justificatif, pour y exercer, à titre individuel, le culte en évitant tout regroupement avec des personnes ne partageant pas leur domicile. Il résulte, par ailleurs, des déclarations faites lors de l’audience par l’administration, que des instructions ont été données pour que les fidèles puissent se déplacer dans le lieu de culte le plus proche de leur domicile ou situé dans un périmètre raisonnable autour de celui-ci en cochant, en l’état du modèle-type de justificatif qui gagnerait à être explicité, la case « motif familial impérieux ». Enfin, les ministres du culte peuvent continuer à recevoir individuellement les fidèles dans les établissements précités et à se rendre, au titre de leur activité professionnelle, au domicile de ceux-ci ou dans les établissements dont ils sont aumôniers. 

Sur les demandes en référé : 

 

17. En premier lieu, il résulte de l’instruction que la circulation du virus sur le territoire métropolitain s’est fortement amplifiée au cours des dernières semaines malgré les mesures prises conduisant à une situation particulièrement dangereuse pour la santé de l’ensemble de la population française. Ainsi, au 1er novembre 2020, plus de 1.4000.000 cas ont été confirmés positifs à la covid-19, en augmentation de près de 50.000 dans les dernières vingt-quatre heures, le taux d’incidence national étant de 438 cas pour 100.000 habitants contre 246 au 20 octobre et 118 au 28 septembre, le taux de positivité des tests réalisés étant de 20,4 % au 1er novembre contre 13,2 % au 18 octobre et 9 % au 28 septembre, 38.289 décès de la covid-19 sont à déplorer au 3 novembre 2020, en hausse de 430 cas en vingt-quatre heures. Enfin, le taux d’occupation des lits en réanimation par des patients atteints de la covid-19 est passé de 43 % au 20 octobre à près de 70 % au 1er novembre, mettant en tension l’ensemble du système de santé. Cette évolution particulièrement inquiétante de la propagation du virus sur l’ensemble du territoire national s’est encore accélérée au cours des dernières semaines et des derniers jours du mois d’octobre, malgré les mesures de police sanitaire graduées en fonction de la situation sanitaire de chaque territoire prises pour faire face au risque de reprise de l’épidémie.

 

18. En deuxième lieu, pour éviter les effets économiques et sociaux les plus néfastes qui avaient été constatés lors du premier confinement, le décret a autorisé, lors de celui qui a débuté le 29 octobre 2020, outre la réalisation des achats de première nécessité, le maintien de l’accueil des élèves dans leurs établissements scolaires, la poursuite aussi large que possible des activités professionnelles ne pouvant faire l’objet de télétravail, notamment en matière de services publics, et l’utilisation par les intéressés, en tant que de besoin, des moyens de transport. En cette période d’augmentation très forte des risques liés à l’épidémie, il a, en revanche, limité les autres motifs permettant de sortir de son domicile ainsi que les rassemblements et réunions, en interdisant, notamment, ceux de plus de six personnes dans tous les lieux ouverts au public, à l’exception, ponctuelle et s’exerçant à l’extérieur, des manifestations sur la voie publique. 

 

19. En troisième lieu, si le conseil scientifique covid-19 s’est référé, dans sa note d’alerte du 22 septembre 2020, à une étude américaine selon laquelle les églises n’ont pas été retrouvées parmi les lieux à risque d’infection, le même constat y était fait pour d’autre lieux comme les magasins et les transports en commun et il a précisé qu’en France, en dehors des clusters, dont il est constant qu’ils ne représentent qu’une partie marginale des lieux à risque d’infection, aucune des données disponibles ne permet d’identifier ces lieux. Par ailleurs, dans une annexe de sa note du 26 octobre 2020, le même conseil scientifique a rappelé que le risque de transmission du virus à l’occasion d’un rassemblement est d’autant plus élevé qu’il a lieu dans un espace clos, mal ventilé, avec une forte densité de participants, une absence de port de masque et un niveau élevé d’émission de gouttelettes lié notamment à la parole et au chant. Il a été précisé que le risque diminue en cas de protocole sanitaire strict et lorsque l’attitude des participants est prévisible. S’il a été indiqué à cet égard que « les lieux de culte pourraient rester ouverts », c’est uniquement « à condition qu’ils respectent les protocoles sanitaires stricts contractualisés ». Or, il résulte de l’instruction que si des protocoles sanitaires ont été élaborés, lors du déconfinement, pour les lieux de culte à l’initiative notamment, pour ce qui concerne l’Eglise catholique, des évêques, ils n’ont pas été actualisés depuis lors et ne sont pas toujours strictement appliqués, notamment depuis l’été, en ce qui concerne la distanciation entre les fidèles, y compris à l’entrée et à la sortie des lieux de culte, et le port du masque par les officiants, alors même qu’un public âgé et donc fragile, participe aux cérémonies religieuses.

 

20. En quatrième et dernier lieu, les restrictions apportées par les dispositions contestées à la liberté du culte, et plus particulièrement au droit de participer collectivement à des cérémonies dans les établissements précités, sont entrées en vigueur le 3 novembre 2020, en vertu de l’article 56 du décret litigieux, notamment pour tenir compte de la fête de la Toussaint et du jour consacré à la commémoration des fidèles défunts. Elles prendront fin, au plus tard, au terme de l’état d’urgence sanitaire qui est fixé, à ce jour, au 16 novembre 2020. Enfin, il a été indiqué à l’audience, dans la perspective de la prorogation de l’état d’urgence sanitaire qui est en cours de discussion au Parlement, que ces dispositions vont prochainement faire l’objet d’un réexamen de leur caractère adapté et proportionné, ce qui suppose l’engagement à bref délai d’une concertation avec l’ensemble des représentants des principaux cultes, destinée à préciser les conditions dans lesquelles ces restrictions pourraient évoluer. 

 

21. Il s’en déduit que les moyens tirés de ce que les restrictions litigieuses, qui sont motivées par des considérations exclusivement sanitaires, qui ne sont discriminatoires à l’égard d’aucun culte ou d’aucun rite et qui ne méconnaissent pas le principe de clarté et d’intelligibilité de la norme, ne seraient ni nécessaires ni proportionnées doivent, en l’état de l’instruction et à la date de la présente ordonnance, être écartés. Les requérants ne sont, dès lors, pas fondés à soutenir que l’atteinte que les dispositions contestées portent à la liberté de culte ainsi qu’au droit au respect de leur liberté personnelle, à la liberté d’aller et venir et à la liberté de réunion, serait manifestement illégale. 

 

22. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la condition relative à l’urgence, que les requêtes doivent être rejetées, y compris les conclusions aux fins d’injonction et d’astreintes dont certaines sont assorties et, dans chaque affaire, les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. N°s 445825 et suivants 25 

 

O R D O N N E : 

 

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Article 1er : Les interventions de l’Association familiale catholique (AFC) de Nice et l’association « Pour la messe », sous le n° 445853, Mgr AF... et l’Association familiale catholique (AFC) Centre Alsace, sous le n°445878, ainsi que de M. GF..., sous le n°445879, sont admises. 

 

Article 2 : Les requêtes présentées par l’association CIVITAS, M. S..., M. CH..., M. V... et autre, Mgr AZ... et autre, M. CM... et autres, l’association cultuelle Fraternité sacerdotale Saint Pierre et autres, la fédération départementale des associations familiales catholiques du Bas-Rhin et autres, M. BE... et autres, l’association Fondation service politique, le parti « VIA - La voie du peuple » et autre, Mgr C... et autres, Mme DT... et autre, M. CY... et autres, Mgr DP... et autres, la conférence des évêques de France et autres, le père AC... et autres, Mgr AA..., Mme CZ... et autres, ainsi que la société cléricale Saint Pie X sont rejetées. 

 

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à l’association CIVITAS, à M. J...-EW... S..., à M. GO...-BR... CH..., à M. J...-GK... V..., à Mgr BV... AZ..., à M. AK... CM..., à l’association cultuelle Fraternité sacerdotale Saint Pierre, à la fédération départementale des associations familiales catholiques du Bas-Rhin, à M. FE... BE..., à l’association Fondation service politique, au parti « VIA - La voie du peuple », à Mgr EW... C..., à Mme F... DT..., à M. BK... CY..., à Mgr H... DP..., à la conférence des évêques de France, au père Louis-Emmanuel AC..., à Mgr BQ... AA..., à Mme AB... CZ... et à la société cléricale Saint Pie X, en tant que requérants premièrement dénommés, à l’Association familiale catholique (AFC) de Nice, à l’association « Pour la messe », à Mgr AF..., à l’Association familiale catholique (AFC) Centre Alsace et à M. GF... en tant qu’intervenants ainsi qu’au ministre de l’intérieur. 

 

Copie en sera adressée au Premier ministre et au ministre des solidarités et de la santé.