Cour de cassation 

chambre sociale 

Audience publique du mercredi 4 mars 2020 
N° de pourvoi: 18-10719 

Publié au bulletin Cassation partielle



M. Cathala, président 

Me Balat, SCP Célice, Texidor, Périer, avocat(s) 

 



Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : 

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 4 mars 2020

Cassation partielle

M. CATHALA, président

Arrêt n° 267 FS-P+B sur le 4e moyen

Pourvoi n° Y 18-10.719

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 MARS 2020

Mme M... B...-R..., domiciliée [...], a formé le pourvoi n° Y 18-10.719 contre l'arrêt rendu le 17 novembre 2017 par la cour d'appel de Nancy (chambre sociale 2), dans le litige l'opposant à l'association Aroéven Lorraine, dont le siège est [...], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Joly, conseiller référendaire, les observations de Me Balat, avocat de Mme B...-R..., de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de l'association Aroéven Lorraine, et l'avis de Mme Rémery, avocat général, après débats en l'audience publique du 28 janvier 2020 où étaient présents M. Cathala, président, M. Joly, conseiller référendaire rapporteur, Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen, MM. Pion, Ricour, Mmes Van Ruymbeke, Capitaine, Gilibert, conseillers, MM. Silhol, Duval, Mme Valéry, conseillers référendaires, Mme Rémery, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre.

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; 

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme B...-R... a été engagée le 7 novembre 2011 par l'association Aroéven Lorraine (l'association), en qualité de coordinatrice du secteur accueil collectif de mineurs ; qu'ayant été placée en arrêt de travail pour maladie à compter du 7 mars 2013, elle a été déclarée inapte à son poste par le médecin du travail à l'issue des examens des 29 août et 12 septembre 2014 ; qu'elle a été licenciée pour inaptitude le 3 décembre 2014 ; que, le 8 janvier 2015, la salariée a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de nullité de son licenciement et de condamnation de l'association au paiement de diverses sommes à titre de dommages-intérêts et de rappel de salaire ;

Sur les premier, deuxième et troisième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens ci-après annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le quatrième moyen :

Vu l'article L. 1226-4 du code du travail ;

Attendu que, selon ce texte, l'employeur est tenu de verser au salarié victime d'une maladie ou d'un accident non professionnel, qui n'est pas reclassé dans l'entreprise à l'issue du délai d'un mois à compter de la date de l'examen de reprise du travail ou qui n'est pas licencié, le salaire correspondant à l'emploi qu'il occupait avant la suspension de son contrat de travail ;

Attendu que pour condamner la salariée à rembourser à l'association les salaires versés par cette dernière entre le 12 octobre 2014, soit un mois après sa déclaration d'inaptitude, et le 3 décembre 2014, date de son licenciement, la cour d'appel a retenu que depuis le 17 septembre 2014, la salariée avait retrouvé un nouvel emploi à temps plein ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le contrat n'avait été rompu que par le licenciement intervenu le 3 décembre 2014, de sorte que l'employeur était tenu de verser à la salariée, pour la période du 12 octobre au 3 décembre 2014, le salaire correspondant à l'emploi qu'elle occupait avant la suspension du contrat de travail, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne Mme B...-R... à payer à l'association Aroéven Lorraine les salaires que cette dernière lui a versés du 12 octobre 2014 au 3 décembre 2014, l'arrêt rendu le 17 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Condamne l'association Aroéven Lorraine aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'association Aroéven Lorraine et la condamne à payer à Mme B...-R... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mars deux mille vingt.  

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par Me Balat, avocat aux Conseils, pour Mme B...-R...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme B...-R... de sa demande de nullité du licenciement pour exécution fautive du contrat de travail ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE Mme M... B...-R... a été licenciée le 3 décembre 2014 pour inaptitude à tout poste dans l'entreprise ; que la salariée soutient, d'une part, que les conditions de travail mises en place par l'association Aroéven Lorraine et l'attitude de cette dernière à son égard caractériseraient un harcèlement moral, lequel serait à l'origine de la dégradation grave de son état de santé et donc de l'inaptitude qui a conduit à son licenciement de sorte qu'il devrait être déclaré nul et, d'autre part, qu'à tout le moins, l'association serait responsable d'une exécution fautive du contrat de travail ; que sur le harcèlement moral et la demande de dommages et intérêts afférente, selon l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que l'article L. 1154-1 du même code vient préciser que lorsque survient un litige relatif à l'application des articles du code du travail relatifs au harcèlement moral, le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ; qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que Mme B...-R... dresse ainsi la liste des faits laissant présumer l'existence de harcèlement moral : - l'employeur a refusé d'appliquer les préconisations de la médecine du travail, - l'employeur lui a confié du travail qui n'était pas inclus dans le contrat de travail, - le directeur, M. A... a adopté un comportement dévalorisant et agressif à son encontre ; que sur la réalité des faits énoncés par Mme B...-R... et d'abord sur le refus par l'employeur d'appliquer les préconisations de la médecine du travail, Mme B...-R... justifie de ce que l'association Aroéven Lorraine n'a pas donné suites à la demande de mise en place d'un mi-temps thérapeutique à son profit suite aux préconisations du médecin du travail du 16 décembre 2013 ; que néanmoins, après une étude de poste, le médecin du travail a été en mesure de proposer d'autres modalités de reprise du travail adaptées qui ont été suivies d'effets ; que l'association Aroéven Lorraine a donc respecté les préconisations du médecin du travail ; que ce fait n'est donc pas avéré ; qu'ensuite, sur le fait que l'employeur ait confié à Mme B...-R... du travail qui n'était pas inclus dans son contrat de travail, le contrat de travail liant les parties définissait la fonction de Mme B...-R... comme étant celle de coordinatrice du secteur ACM sous l'autorité hiérarchique de M. A..., directeur ; que Mme B...-R... prétend qu'elle a notamment dû réaliser le catalogue alors que son contrat de travail ne le prévoyait pas ; que la fiche de profil de poste de Mme B...-R... spécifie qu'elle avait en charge la seule promotion et la commercialisation des activités du secteur notamment par le catalogue des séjours et non pas la confection dudit catalogue, ce qui est conforté par le fait que Mme B...-R... ait bénéficié d'une prime exceptionnelle destinée à la récompenser pour les heures supplémentaires passées, en partie, à la confection du catalogue ; que ce fait est donc avéré ; qu'enfin, sur le comportement dévalorisant et agressif du directeur, M. A..., à l'encontre de Mme B...-R..., le médecin du travail a été en mesure de vérifier lui-même l'attitude agressive du directeur quant à la situation de Mme B...-R..., lors de l'étude de poste réalisée par le médecin, lequel a alors été contraint de placer Mme B...-R... en inaptitude temporaire ; que l'analyse des trois mails que se sont échangés Mme B...-R... et M. A..., au mois d'avril 2014 témoigne de ce que les rapports entre eux deux étaient devenus très tendus à cette période ; que ce fait est donc avéré en ce qui concerne l'agressivité du supérieur hiérarchique de la salariée ; que sur l'analyse globale de ces faits, Mme B...-R... est parvenue à établir la réalité de deux des trois faits allégués par elle comme constituant une présomption de harcèlement moral ; que cependant, pris dans leur ensemble, les deux faits établis apparaissent insuffisants pour caractériser du harcèlement moral, considération prise de leur nombre limité et de ce qu'ils s'attachent à une période réduite ; que l'existence d'une situation conflictuelle entre la salariée et son supérieur hiérarchique n'a pas dégénéré en des agissements portant atteinte à ses droits et à sa dignité ou de nature à porter atteinte à sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnelle ; que faute de preuve d'un harcèlement moral, il y a lieu de débouter Mme B...-R... de sa demande de nullité de son licenciement et de dommages et intérêts sur ce fondement ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE le conseil dit que Mme B...-R... ne rapporte pas la preuve d'un harcèlement moral au regard de la définition du code du travail ;

ALORS, D'UNE PART, QUE pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral ; que dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que Mme B...-R... était « parvenue à établir la réalité de deux des trois faits allégués par elle comme constituant une présomption de harcèlement moral » (arrêt attaqué, p. 7, alinéa 4) ; qu'en considérant toutefois que la preuve d'un harcèlement moral n'était pas rapportée, au motif que « pris dans leur ensemble, les deux faits établis apparaissent insuffisants pour caractériser du harcèlement moral, considération prise de leur nombre limité et de ce qu'ils s'attachent à une période réduite », et que dans ces conditions, « l'existence d'une situation conflictuelle entre la salariée et son supérieur hiérarchique n'a pas dégénéré en des agissements portant atteinte à ses droits et à sa dignité ou de nature à porter atteinte à sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnelle » (arrêt attaqué, p. 7, alinéa 5), cependant que, dès lors qu'elle constatait l'existence d'actes harcèlement moral avérés, il importait peu de savoir que ceux-ci étaient « en nombre limité » ou encore qu'ils ne concernaient qu'une « période réduite », puisqu'en tout hypothèse l'employeur avait échoué à démontrer l'absence de tels actes et à établir que ces actes étaient étrangers à tout harcèlement, la cour d'appel, qui s'est déterminée par une motivation inopérante au regard des principes susvisés, a violé l'article L. 1154-1 du code du travail ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral ; que dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en affirmant, par motifs adoptés (jugement entrepris, p. 5, alinéa 13) que « Madame B...-R... M... n'apporte pas la preuve d'un harcèlement moral au regard de la définition du Code du Travail", la cour d'appel a fait peser l'intégralité de la charge de la preuve sur la salariée et a violé l'article L. 1154-1 du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme B...-R... sa demande de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail ;

AUX MOTIFS QUE les faits énumérés et établis par Mme B...-R... à l'encontre de l'association Aroéven Lorraine sont, également insuffisants pour caractériser une exécution fautive du contrat de travail susceptible de générer l'octroi de dommages et intérêts, considération prise de leur nombre et de leur nature ; que Mme B...-R... est donc déboutée de sa demande tendant à faire dire et juger que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse de ce fait et en paiement de dommages et intérêts sur ce fondement ;

ALORS QUE tout jugement doit être motivé ; qu'en déboutant Mme B...-R... de ses demandes dirigées à l'encontre de l'association Aroéven Lorraine, relative à une exécution fautive du contrat de travail par cette dernière, au seul motif que les faits invoqués par la salariée « sont, également insuffisants pour caractériser une exécution fautive du contrat de travail susceptible de générer l'octroi de dommages et intérêts, considération prise de leur nombre et de leur nature » (arrêt attaqué, p. 8), la cour d'appel n'a pas sérieusement motivé sa décision et a violé l'article 455 du code de procédure civile.

SUR LE TROISIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme B...-R... de sa demande tendant à voir juger que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE sur la cause réelle et sérieuse du licenciement de Mme B...-R..., celle-ci soutient que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, l'association Aroéven Lorraine ayant failli à son obligation de reclassement ; que le salarié déclaré inapte à son poste à l'issue du deuxième examen prévu par l'article L. 4624-31 du code du travail bénéfice d'une obligation de reclassement qui doit être recherché dans le mois qui suit cet examen ; que cette obligation de reclassement doit être mise en oeuvre après l'avis définitif d'inaptitude et avant le licenciement ; qu'il appartient à l'employeur de démontrer par des éléments objectifs qu'il y a satisfait et que le reclassement du salarié s'est avéré impossible, soit en raison de son refus d'accepter un poste de reclassement adapté à ses capacités et conforme aux préconisations du médecin du travail, soit du fait de l'impossibilité de reclassement à laquelle il se serait trouvé confronté ; que dans la fiche d'aptitude médicale du 29 août 2014, le docteur C... a déclaré Mme B...-R... inapte au poste mais apte à tout autre poste correspondant à ses compétences, comportant moins de facteurs de stress, dans un autre environnement professionnel ; qu'aux termes de son deuxième examen, le docteur C..., le 12 septembre 2014 a confirmé son premier avis ; qu'en l'occurrence, aucun poste de reclassement n'a été proposé à Mme B...-R... ; qu'il convient donc d'apprécier si l'association Aroéven Lorraine s'est effectivement trouvée dans l'impossibilité de reclasser Mme B...-R... ; qu'à cet égard, elle fait valoir qu'elle a procédé à une recherche de reclassement sérieuse et loyale auprès des Aroéven de France et de la Foéven, alors qu'elle n'y était pas tenue puisqu'en tant qu'Aroéven de Lorraine, elle est indépendante, sans lien avec les autres Aroéven du territoire national ; que Mme B...-R... soutient que l'association Aroéven Lorraine se devait de procéder à une recherche de reclassement au niveau de toutes les associations Aroéven ; qu'en l'état des éléments soumis tant par l'association Aroéven Lorraine que par Mme B...-R..., il n'est pas démontré que l'organisation des associations Aroéven fédérées au sein de la Foéven permettait une permutation de leur personne entre les associations et qu'elles faisaient partie d'un même groupe de reclassement ; que dès lors, l'association Aroéven Lorraine n'avait pas d'obligation de reclassement au niveau de toutes les associations Aroéven et de la Foéven, étant souligné qu'elle a néanmoins sollicité toutes les Aroéven de France y compris celles de Champagne-Ardennes, de Créteil et de la Picardie et a laissé un temps suffisant aux associations sollicitées pour répondre ; qu'en définitive, l'association Aroéven Lorraine a procédé à une recherche sérieuse et loyale de reclassement de sorte que le licenciement de Mme B...-R... doit être considéré comme ayant une cause réelle et sérieuse ;

ALORS QU' il incombe à l'employeur d'établir qu'il a satisfait à son obligation de reclassement ; qu'en déboutant Mme B...-R... de sa demande fondée sur un manquement de l'employeur à son obligation de reclassement, au motif que, si la salariée invoquait la possibilité d'un reclassement dans une autre association du groupe auquel appartenait l'association Aroéven Lorraine, la preuve de ce que cette association faisait partie d'un même groupe de reclassement n'était pas rapportée (arrêt attaqué, p. 8, alinéa 7), la cour d'appel, qui a ainsi fait peser la charge de la preuve sur la salariée et non sur l'employeur, a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1353 du code civil.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'avoir condamné Mme B...-R... à payer à l'association Aroéven Lorraine les salaires que cette dernière lui avait versés du 12 octobre 2014 au 3 décembre 2014 ;

AUX MOTIFS QUE l'article L. 1226-4 du code du travail prévoit que, lorsque, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ou s'il n'est pas licencié, l'employeur lui verse, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail ; que ces dispositions s'appliquent également en cas d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise constatée par le médecin du travail ; qu'en l'espèce, Mme B...-R... a été déclarée médicalement définitivement inapte à son poste le 12 septembre 2014 et l'association Aroéven Lorraine l'a licenciée le 3 décembre 2014, soit au-delà du délai de un mois ci-dessus imparti ; que l'association Aroéven Lorraine se devait de payer, de nouveau, son salaire à Mme B...-R... à compter du 12 octobre 2014 ; que cependant, entretemps, à savoir, le 17 septembre 2014, Mme B...-R... a retrouvé un emploi à plein temps ; que c'est donc à juste titre que l'association Aroéven Lorraine sollicite la condamnation de la salariée à lui rembourser les salaires que l'association Aroéven Lorraine lui a versés entre le 12 octobre 2014 et le 3 décembre 2014 ;

ALORS QUE l'employeur est tenu de verser les salaires du salarié inapte non reclassé et non licencié à l'expiration du délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, peu important le fait que le salarié ait, ou non, retrouvé une activité professionnelle ; qu'en constatant que « Mme B...-R... a été déclarée médicalement définitivement inapte à son poste le 12 septembre 2014 et l'association Aroéven Lorraine l'a licenciée le 3 décembre 2014, soit au-delà du délai de un mois ci-dessus imparti », de sorte que « l'association Aroéven Lorraine se devait de payer, de nouveau, son salaire à Mme B...-R... à compter du 12 octobre 2014 » (arrêt attaqué, p. 8 in fine et p. 9 in limine), puis en condamnant cependant la salariée à rembourser les salaires perçus du 12 octobre 2014 au 3 décembre 2014, au motif que « le 17 septembre 2014, Mme B...-R... a retrouvé un emploi à plein temps » (arrêt attaqué, p. 9, alinéa 2), la cour d'appel, qui s'est déterminée par un motif inopérant, a violé l'article L. 1226-4 du code du travail. 



ECLI:FR:CCASS:2020:SO00267 


Analyse

Publication : 



Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy , du 17 novembre 2017

  • Titrages et résumés : CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Maladie - Maladie ou accident non professionnel - Inaptitude au travail - Obligation de reclassement - Délai d'un mois - Absence de reclassement ou de licenciement - Sanction - Reprise du paiement du salaire - Salaire de l'emploi précédemment occupé - Nécessité - Portée

    En application de l'article L. 1226-4 du code du travail, l'employeur est tenu de verser au salarié victime d'une maladie ou d'un accident non professionnel, qui n'est pas reclassé dans l'entreprise à l'issue du délai d'un mois à compter de la date de l'examen de reprise du travail ou qui n'est pas licencié, le salaire correspondant à l'emploi qu'il occupait avant la suspension de son contrat de travail

    TRAVAIL REGLEMENTATION, REMUNERATION - Salaire - Paiement - Obligation de l'employeur - Cas - Suspension du contrat de travail - Inaptitude du salarié - Absence de reclassement ou de licenciement - Sanction - Détermination - Portée

    Précédents jurisprudentiels : Sur le principe selon lequel, si un salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ni licencié à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de la seconde visite médicale de reprise du travail, l'employeur est tenu de lui verser le salaire correspondant à l'emploi qu'il occupait avant la suspension de son contrat de travail, à rapprocher :Soc., 3 juillet 2013, pourvoi n° 11-23.687, Bull. 2013, V, n° 177 (rejet), et l'arrêt cité. 

    Textes appliqués : 

    • article L. 1226-4 du code du travail